jeudi 18 août 2016

French Bites 70 : Saucisson, Prozac & Soupe Miso - Mixtape #7

Les "french bites" en question ce sont ces bouchées d'apéritif dont les publicités anglo-américaines font glousser les français et sont plus communément connues sous le terme, tout aussi idiot, d'amuses-bouche. De petites crottes consommables qui ne coupent pas l'appétit (aussi peu spirituel soit-il), telle la musique que l'on adore haïr, que l'on hait adorer mais qui donne le goût d'un évènement, d'un sentiment qui se déclare à la masse.
L'auteur de ces lignes garde dans un quelconque top-quelque-chose des meilleurs moments de son cerveau, une nuit de fête disco-mobile dans un camping de colonie de vacances, des baisers glanés à action-ou-vérité ou l’innocence crétine inhérent à l'âge pré-ingrat, aidée de ces amuses-gueule sonores. C'était un mois d'août.

L.P. Hartley ouvre son roman The Go-Between par cette phrase connue et recyclée depuis: "The past is a foreign country: they do things differently there". Cette citation peut être interprétée d'un point de vue purement personnel, et ensuite plus général. 
La nostalgie n'est-elle pas un pays étranger en elle-même, un pays imaginaire où les sujets seraient mus par un scénario sans cesse arrangé, pétri et remodelé selon l'envie et la fantaisie décorative de celui qui le regénère ? La lumière plus belle ici, une personne meilleure là, un âge plus doux.

La narration de cette bande-de-mélange tente de recréer ce que devait être l'excitation phallocrate de cet entre-deux civilisationnel dans les triomphantes années soixante-dix, entre extase avec des roulés aux fraises dans les yeux, rires gras de celui qui n'a plus que cela, et un certain occultisme jambon-beurre. La douce bêtise d'hommes poilus et avinés, redoutant ou appelant de leurs vœux cette libération des mœurs tombée comme la foudre sur un caillou con et froid.  L'indulgence de ces femmes-courages (et non femmes-courges), qui ne disent rien, ou si peu, pour mieux sublimer la connerie de leurs hommes, ou ne pas la leur renvoyer en pleine face. La guerre des sexes fût alors une farce, tout au moins une récréation des mœurs, légère et la misogynie son bras armé. Cette compilation doit beaucoup au cinéma de Joel Séria, Claude Zidi, Alain Corneau même, et son utilisation dans Série Noire des variété radiophoniques débilitantes comme toile de fond et contrepoint au suicide quotidien. Et puis Max Pécas, ne jamais oublier ce génie du septièmnanar, son nom seul suffit à finir ce paragraphe avec le panache imbécile qui dore ses navets.

- "T'es pas méchant Roger, mais t'es vraiment un con..."


mercredi 24 février 2016

Paraiso Nippon 70 Vol.2 : City Pop & Hippīyūtopia - Mixtape #6

Tout le monde est revenu à la ville.
Reste encore un air lascif dans les environs, rêves d'Afrique en Orient.
Cet air qui surélève les matins, à travers les petites bruines de café au lait, à hauteur d'une lumière spectrale, euphorie d'un soleil rasant, qui monte à mesure que ses orangées baissent.
A travers la fenêtre, la marche des yakuzas aux crânes mouillés par le frimas subtropical. Ils s'activent, ils battent cet air-là, drogués par l'absence de doutes. Ils claquent des portes, ils claquent des nuques, dans un drone imperceptible de sirènes. Le métro, sac de vers qui s'agitent, eux-mêmes gorgés de parasites; expulsés et avalés en polyrythme. L'organique écheveau demande son dû, ces longs nématodes coprophages qui ne vont nulle part.
Les opposants s'opposent, la jeunesse dorée se dore. Le cri des utopies verra son dernier écho absorbé par un mur.
La fin de la génération Zenkyōtō fera place à de jeunes êtres cacochymes, les Hippies devenant Techno. Les planches d'Ezo qui raisonnent, des circuits imprimés qui conduisent. L'espoir, une bulle économique. 
L'âme plissée comme un tamahagane, ils sortiront de la grande mer, éternels amniotiques d'un âge révolu.


 

mercredi 23 décembre 2015

Un, Deux, Trois... Un, Deux, Trois - Mixtape #5

À bien des égards, la consumérisme est une danse qui voit son acmé prodigale à la fin décembre de chaque année, un mouvement en ligne droite, projeté vers un but au devant, pathologiquement robotique.
La valse, elle, transe aristocratique, circulaire, libre et folle, sans cotés, ni derrières ni devants, était ou reste dans quelques esprits, le mouvement associé aux solstices d'hiver. Un carousel au milieu d'un mall, une boite à musique dans un paquet de Kellogg's, un couple viennois au rayon conserve, une roue dans un bâton : l'idée était de faire l'anti-répertoire de Noël haï. Celui des Jingle Bells r'n'b au rayon fromage, la coca-colatisation des visages tordus par l'envie, des enfants obèses qui veulent manger du plastique chinois, et les meurtriers de St-Nicolas qui rodent en jogging au rayon Hi-Fi. Joyeux tournis.

Moi je m'en balance, je me balance.

 

mercredi 27 mai 2015

En Français Dedans Le Texte - Bande-de-mélange #4

 Un matin de mai, je me réveille dans un monde parallèle, un monde où il y a très longtemps, Richard Cœur de Lion, lassé qu'on lui rappelle qu'il ne parle pas anglais, aurait malgré toute sa bienveillance, forcé ses sujets à plutôt apprendre le français (parce que, merde). Un monde où Napoléon Premier aurait finalement décidé de garder la Louisiane et de réfléchir à deux fois à ses manœuvres tacticiennes de 1815 ; dans ce monde là, j'allume ma radio et stupéfait, me gausse d'étranges élocutions, de syntaxes à moitié mastiquées, et de drôles de paroles. Il s'agit d'un monde où le français est partout, multiforme et hégémonique.

Je me précipite vers mon ordinateur qui s'appelle maintenant iPoire, j'apprends justement que Steph Boulots, le patron de Poire est mort du cancer dernièrement, que le New York Times a du mal à joindre les deux bouts, tandis que Libération est lu dans le monde entier. Le steak-frites et les travers de porc ont envahi la planète (quelques snobs appellent encore cela des ribs). La France est la plus grande puissance mondiale, et les Etats-Désunis (Oui, car la Louisiane leur bouche l'Union par le milieu) sont un ilot d'anglophonie résistant malgré tout aux coups de boutoirs de l'hégémonie françoise.

Je reviens à ma radio, et y discerne des choses connues comme "Casquette de Moire / Quéquette D'Ivoire" Rimbaud donc, chanté par une fille avec un accent à couper au fil à beurre, Kevin Ayers qui affirme avoir mal au cul et Robin Williamson, la moitié de The Incredible String Band, se plaindre que "Les danses bizarres / De ce monde patinoire / Gênent maintenant (s)es yeux."
Jenifer Juniper vit sur la colline, assise très tranquille, et Tim Buckley veut épouser sa danseuse du Moulin Rouge dans un accent impossible.

Honi soit qui mal y pense, moi je retourne me coucher.




dimanche 11 août 2013

Paraiso Nippon '70 - Mixtape #3

 Dans la chaleur sèche de l'août hollywoodien, Shigeru et Lowell se partagent une ligne de Medellín avec un cou de bouteille. C'est pur, blanc et sans reproches, les spasmes d'excitation pareils aux mi-parcours extatiques d'une pisse retardée.
La caravelle Panam décolle dans quelques heures direction Edo et les cirrostratus au dessus du Pacifique. Haruomi, grand gourou Dennysien est revenu d'Inde ou d'ailleurs, il parait.
Le Tin Pan Alley se rabiboche sur la jetée, la holy weed de Big Sur dans les semelles et le départ du ferry pour Okinawa talonnant l'atterrissage du bélouga en fer blanc.
Taeko est restée en ville et les autres sur leur esquif, plongés dans une torpeur estivale faite nuage, s'écoutent sur le transistor mou; crises de rire, des grognements ronflants. Les nuages cargo, partout des nuages cargo. La nuit: des averses de météores.
On croit voir Honolulu même si c'est toujours le pays, on croit voir un ours blanc sur une colline jaune, c'est toujours le pays, morcelé jusqu'au dernier carré de sucre. Les uns dans les autres, dans une ferveur siestique, les chats aux yeux mi-clos annoncent Terre la patte levée. Chargés comme des raies électriques, ils nagent vers le récif et ne se réveilleront plus.
Ça n'avait pas l'air d’être Nara, ce sera le paradis.



samedi 3 novembre 2012

And Then He Ripped Me - Mixtape #2

 Barney Kessel ne se doutait pas que sa séance d'enregistrement avec les Crystals à l'été 1963 allait d'une part catapulter son riff loin dans le futur, inspirer des dizaines de chansons et d'autre part faire dire à John Lennon qu'il voudrait exactement le même son de guitare sur les disques des Beatles, ce qui fera dire à Roger McGuinn qu'il voudrait exactement le même son de guitare que les Beatles sur les disques des Byrds, et ainsi de suite. Le tout en quatre notes, sur une 12 cordes.

jeudi 8 mars 2012

Joseph Beuys goes Populaire


Joseph Beuys dans une diatribe pop endiablée anti-Reagan, ça vaut son pesant de feutre.